AVEC ELLE, SANS ELLE

from 01/03 to 19/05/18

DANI SOTER

 Absence

Pendant longtemps j’ai cru que l’absence est manque.
Et je déplorais, ignorant, ce manque.
Aujourd’hui, je ne le déplore plus.
Il n’y a pas de manque dans l’absence.
L’absence est une présence en moi.
Et je la sens, blanche, si bien prise, blottie dans mes bras,
Que je ris et danse et invente des exclamations joyeuses,
Parce que l’absence, cette absence incorporée,
Personne ne peut plus me la dérober.

« Avec elle, sans elle », le titre de l’exposition de Dani Soter, est inspiré d’Absence du poète brésilien Carlos Drummond de Andrade. Selon le poète, l’absence, n’est pas un manque mais une « absence incorporée ». De ce jeu de miroir découle la série photographique de l’artiste brésilienne Dani Soter. Les oeuvres présentées dans l’exposition font écho aux vers d’Absence. L’artiste fait de la trace, du résidu, voire du déchet, le coeur même de sa démarche. Ces empreintes prennent la forme d’un bout de papier, d’une fraise dénudée de ses akènes, d’une griffure sur la peau, d’un mégot de cigarette où l’on trouve encore la trace d’un rouge à lèvres sur le filtre, d’un arum dénudé de sa fleur offrant au regard son très érotique spadice. Autant d’éléments résiduels auxquels nous ne faisons plus attention, car anodins, futiles, triviaux. Dani Soter donne à voir ce qui ne se voit plus. Ainsi, dans la photographie où la pointe d’un téton transperce le vêtement, le caché devient visible ; ou encore cette photographie dans la veine surréaliste où une jambe d’un mannequin en plastique (que l’on imagine sans corps, sans tête) est ceinte d’un collant opaque qui transperce la composition de la photographie. Dans le monde clos d’une boutique pour femmes, les rembourrages et les bonnets de soutiens gorges côtoient les bretelles et pressions pour sous-vêtements féminins et les semelles en silicone pour chaussures. Ces artifices que l’on cache habituellement sont dévoilés au grand jour. Tout comme l’éraflure sur la peau blanche que l’on cache par coquetterie est ici pleinement découverte, ou encore ces canapés éventrés abandonnés dans la rue au regard de tous. « Avec elle, sans elle » pourrait presque être une variation sur la banalité du quotidien, sur ce qui est caché et d’où émerge un récit intimiste dans l’inconscient du regardeur.

Dani Soter a réalisé cette série photographique avec son téléphone portable pour plus de liberté. L’artiste s’abandonne à un émerveillement par surprise, une découverte dénuée de considérations techniques et matérielles de la prise de vue. La technicité devient secondaire pour faire primer la découverte, l’instantanéité. L’intérêt se porte sur un moment fugace sur lequel tombe l’artiste au détour d’une promenade ou du hasard de la marche. La beauté, subjective, se trouve en toute chose et l’artiste agit en révélateur de cette beauté cachée.

Clotilde Scordia

DANI SOTER

 Absence

Pendant longtemps j’ai cru que l’absence est manque.
Et je déplorais, ignorant, ce manque.
Aujourd’hui, je ne le déplore plus.
Il n’y a pas de manque dans l’absence.
L’absence est une présence en moi.
Et je la sens, blanche, si bien prise, blottie dans mes bras,
Que je ris et danse et invente des exclamations joyeuses,
Parce que l’absence, cette absence incorporée,
Personne ne peut plus me la dérober.

« Avec elle, sans elle », le titre de l’exposition de Dani Soter, est inspiré d’Absence du poète brésilien Carlos Drummond de Andrade. Selon le poète, l’absence, n’est pas un manque mais une « absence incorporée ». De ce jeu de miroir découle la série photographique de l’artiste brésilienne Dani Soter. Les oeuvres présentées dans l’exposition font écho aux vers d’Absence. L’artiste fait de la trace, du résidu, voire du déchet, le coeur même de sa démarche. Ces empreintes prennent la forme d’un bout de papier, d’une fraise dénudée de ses akènes, d’une griffure sur la peau, d’un mégot de cigarette où l’on trouve encore la trace d’un rouge à lèvres sur le filtre, d’un arum dénudé de sa fleur offrant au regard son très érotique spadice. Autant d’éléments résiduels auxquels nous ne faisons plus attention, car anodins, futiles, triviaux. Dani Soter donne à voir ce qui ne se voit plus. Ainsi, dans la photographie où la pointe d’un téton transperce le vêtement, le caché devient visible ; ou encore cette photographie dans la veine surréaliste où une jambe d’un mannequin en plastique (que l’on imagine sans corps, sans tête) est ceinte d’un collant opaque qui transperce la composition de la photographie. Dans le monde clos d’une boutique pour femmes, les rembourrages et les bonnets de soutiens gorges côtoient les bretelles et pressions pour sous-vêtements féminins et les semelles en silicone pour chaussures. Ces artifices que l’on cache habituellement sont dévoilés au grand jour. Tout comme l’éraflure sur la peau blanche que l’on cache par coquetterie est ici pleinement découverte, ou encore ces canapés éventrés abandonnés dans la rue au regard de tous. « Avec elle, sans elle » pourrait presque être une variation sur la banalité du quotidien, sur ce qui est caché et d’où émerge un récit intimiste dans l’inconscient du regardeur.

Dani Soter a réalisé cette série photographique avec son téléphone portable pour plus de liberté. L’artiste s’abandonne à un émerveillement par surprise, une découverte dénuée de considérations techniques et matérielles de la prise de vue. La technicité devient secondaire pour faire primer la découverte, l’instantanéité. L’intérêt se porte sur un moment fugace sur lequel tombe l’artiste au détour d’une promenade ou du hasard de la marche. La beauté, subjective, se trouve en toute chose et l’artiste agit en révélateur de cette beauté cachée.

Clotilde Scordia